Residency Recap: Muddymonk

Salut Guillaume, j’espère que ton séjour au smem s’est bien passé. Peux-tu nous raconter un peu ton intérêt pour ce lieu et l’idée d’y faire une résidence ?

 

En tant que producteur de musique électronique je m’intéresse au Gear depuis mes débuts autour de 2010. J’ai commencé par les samplers pour aller ensuite vers les synthétiseurs, les boîtes à rythmes et les effets en hardware.

Ces 10 dernières années, j’ai cultivé une grande curiosité pour toutes les machine vintage. J’ai énormément regardé de vidéos sur des synthétiseurs, des boîtes, des effets externes… J’en ai acquis certains qui m’intéressaient vraiment et que je pouvais m’acheter. Je les ai beaucoup utilisés dans mes compositions, à vrai dire je n’utilise presque que du hardware ! … Voilà un peu le contexte dans lequel le smem est arrivé dans ma vie et dans ma ville. J’ai effectué une première session dans la Playroom où j’ai eu l’occasion d’enregistrer certains synthétiseurs très rares, trop rares pour pouvoir les posséder. De là m’est venue l’envie de me créer une palette personnalisée pour mes futurs morceaux basés sur des synthétiseurs rares de la collection du smem. J’ai donc monté, en collaboration avec le smem, un dossier pour obtenir une bourse de la part du service de la culture de l’État de Fribourg.

Et c’est ainsi que j’ai donc eu l’opportunité de faire une résidence sur un mois, entre le smem et mon propre studio pour créer une palette de sons issus des machines rares du musée. En gros, l’idée de la résidence était donc de découvrir, d’écouter et enfin d’enregistrer un maximum de machines.

 

La question est un peu classique, mais si tu devais désigner un instrument favori dans la collection, ça serait lequel et pourquoi ?

Je n’ai pas vraiment un instrument favori c’est plutôt dans les différences entre les machine que je trouve de l’inspiration et des nouvelles pistes de travail. Ainsi, les machines qui m’accompagnent changent au fil du temps et se ressentent dans mon œuvre. Par exemple, pour mon premier album, j’ai beaucoup travaillé avec une MPC 2000, ce qui me limitait énormément et qui a donné lieu à des chansons extrêmement simples et épurées tout en leur offrant un son solide.

L’instrument qui m’a le plus marqué est la contrebasse électrique de Framus. J’ai adoré l’enregistrer, le son est superbe et elle a une esthétique incroyable. Du côté des synthétiseurs j’ai moins été subjugué car je connais déjà beaucoup de pièces. Cependant, le Polymoog a retenu mon attention ainsi que la boîte à rythme Rattlesnake. C’est deux instruments électroniques, aussi en partie à cause de leur âge, sont extrêmement organiques, presque vivants. Ils ont des défauts dans le son qui les rendent très intéressants.

 

Comment parlerais-tu de ton rapport aux instruments de musique électronique dans ton processus de création musicale ?

Depuis le début de ma pratique, les instruments électroniques occupent une place prédominante dans mon processus créatif. Je pense que les machine m’aident sous plusieurs aspects. Tout d’abord, le hardware aide à limiter les choix là où le “in the box” est infini. En limitant ses choix, le hardware permet d’avoir une identité forte et une empreinte musicale qui découle directement d’une utilisation d’un nombre limité de synthétiseurs, d’effets, etc. Ensuite, l’utilisation de hardware va permettre d’avoir confiance en sa source et ainsi d’accepter de ne pas en faire des tonnes. Si ta nappe est ample et bien taillée, il n’y a pas besoin de faire 1000 arrangements et de rajouter 1000 éléments dans ta composition.

Et attention : je ne dis pas qu’un plug-in ne peut pas faire une nappe ample et bien taillée, mais c’est aussi de l’ordre du psychologique qu’on accepte mieux qu’une composition soit faite avec un seul synth hardware plutôt qu’avec un unique plug-in. Enfin, le hardware est une grande source d’inspiration car chaque machine est conçue différemment, avec ses points forts, ses côtés limitants et ses traits de caractère. C’est pourquoi il est très important dans ma pratique, car chaque nouvelle machine va me guider vers de nouvelles choses à expérimenter.

 

À quoi ressemblerait ton studio idéal ?

Mon studio idéal serait un studio relativement artisanal, dans un petit coin de Bretagne. Un lieu où on se sent bien, presque un salon. Avec beaucoup de lumière et de chaleur. Mon rêve ultime serait d’avoir une petite chapelle à côté du Studio que je puisse utiliser comme réverb naturelle.

 

Quel conseil donnerais tu as des artistes ?

Je conseille à tous les artistes et non artistes de se concentrer sur le phénomène de la joie. La joie est un bon guide, comme une sorte d’instinct, des pistes à suivre dans la vie. S’il y a des moments où je ne suis plus très sûr de ma direction, j’essaie de toujours faire le point et de me poser la question : est-ce que telle ou telle activité, est-ce que telle relation me fait vivre de la joie ? Et en l’occurrence, tourner les potards d'un synthétiseur me fait expérimenter la joie depuis plus de 10 ans.